Comment concilier fun et écologie ?
Comment concilier fun et écologie ?
L’été arrive, et avec lui, la saison des festivals. Comment concilier fun et écologie ? Depuis quelques années, la problématique écologique émerge dans le débat public. La question du bilan carbone de la culture se pose désormais. Ce sujet devient donc un enjeu pour les organisateurs de festivals. Cependant, cette pratique du festival écoresponsable n’est pas encore très développée.
Selon le classement 2018 réalisé par une ONG britannique sur près de 300 festivals, a Greener Festival, le We Love Green Festival apparaît en 6ème position du classement, derrière le Boom Festival (PT), le Cambridge Folk Festival (UK), le DGTL Festival (NL), le Green Gathering (UK), le Øya Festival (NO). Le Wood Festival (UK) apparaît également au Palmarès des festivals considérés comme très écologiques par l’ONG.
Au regard du petit nombre de festivals éthiques, le témoignage de Najma Souroque, Head of Sustainability & Content au We Love Green Festival, donné dans le cadre de sa Masterclass à l’EAC le 21 mars 2019, est particulièrement éclairant.
« En tant que laboratoire, nous essayons de tester des propositions et de voir ce qui fonctionne, ce qui fonctionne moins, ce qu’il faut améliorer. » Najma Souroque.
Pourquoi un festival se doit-il d’être écoresponsable ? Et surtout, comment faire ?
Découvrez le Best Of de la Masterclass de Najma Souroque à l’EAC le 21 Mars 2019.
Un contexte de prise de conscience des enjeux écologiques
Les sujets écologiques se sont démocratisés depuis la COP21. Il y a une prise de conscience des enjeux écologiques par le grand public en France.
De plus, la musique est un moyen fédérateur de sensibiliser les publics et les artistes qui ne le sont pas encore. Avec 7,2 millions de festivaliers en France en 2018, les festivals peuvent jouer le rôle de porte-voix pour attirer l’attention du grand public sur des causes. C’est le cas par exemple du We Love Green Festival, de Climax, ou des Solidays.
C’est pourquoi les organisateurs de festivals sont mis face à leurs responsabilités : ils ont un impact. C’est le cas notamment du We Love Green Festival, qui accueille en 2019 près de 80 000 personnes en plein cœur de Paris dans le Bois de Vincennes, qui est une zone protégée.
Comment le We Love Green festival parvient-il à être écoresponsable ?
Dans sa Masterclass à l’EAC, Najma Souroque raconte les étapes qui permettent à un festival d’être durable. On retiendra 10 points-clés. Avec un enjeu : penser global.
« Nous essayons de répondre à nos objectifs de développement durable (ODD) de façon transversale. » Najma Souroque.
1 – La restauration
La restauration représente plus de 50% des émissions des gaz à effet de serre générés par un festival. Au We Love Green festival, la traçabilité est favorisée pour faire la part belle à l’agriculture locale et favoriser le circuit court.
Pour assurer une restauration écoresponsable, l’équipe du We Love Green Festival travaille avec des restaurateurs. Ils les accompagnent dans cette démarche en les mettant en relation avec des producteurs locaux. Ils ont aussi travaillé pour leur permettre de mutualiser les camions frigos. Au lieu des 30 camions qui faisaient la queue pour décharger le matin, le We Love Green festival compte aujourd’hui 5 camions pour 51 restaurateurs.
Concernant l’alimentation et l’eau, il n’y a plus de bouteilles d’eau en plastique à usage unique sur le festival, mais des gourdes et des points d’eau.
2 – L’énergie
Dans le choix de carburant, le festival a hésité entre le HVO (huiles végétales hydrogénées), ou l’huile de colza. Le festival a finalement opté pour de l’huile alimentaire usagée. La législation étant complexe, chaque année, le festival demande des dérogations au Ministère de l’écologie pour pouvoir se fournir en huile alimentaire recyclée et pas en fioul afin d’alimenter le générateur du festival.
3 – La protection du site
Le festival travaille avec le site qui les accueille pour protéger les arbres et la biodiversité du parc.
4 – Des toilettes écologiques
Le festival travaille pour retraiter ces déchets organiques pour assurer la circularité. Ces déchets organiques deviennent de l’épandage pour l’agriculture d’Ile-de-France
5 – Une scénographie durable
Pour pouvoir imaginer une scénographie écoresponsable, le festival a créé une plateforme pour récupérer les matériaux utilisés dans le cadre de la mise en scène, pour faire des échanges avec d’autres festivals et se prêter le matériel.
6 – Le tri sélectif sur le festival
Le festival propose des poubelles multimatériaux et compost, car depuis qu’ils peuvent recycler les mégots, le festival ne produit plus d’ordures ménagères.
« Nous avons valorisé 74% des déchets l’an dernier. » Témoigne Najma Souroque.
7 – La question des transports
Le festival étant localisé dans Paris, il est bien desservi par les transports en commun. Cependant, plus il deviendra célèbre et international, plus les déplacements seront un sujet. Il faudra alors que le We Love Green festival travaille pour proposer des solutions d’acheminement aussi durables que possible.
8 – Les think tanks et les conférences : le rôle de porte-voix
Le festival a vocation à jouer un rôle de porte-voix pour les sujets environnementaux. Il accueille donc des militants et des ONGs. Cette année, l’équipe s’est attelée à développer une scène de conférences ambitieuse en partenariat avec Le Monde.
9 – L’adoption d’une promotion responsable
Le We Love Green réfléchit également à sa communication, pour la rendre la moins polluante possible. Il n’y a donc pas de flyers distribués pour promouvoir le festival, et le line up est affiché sur des écrans ou sur des bâches imprimées que l’équipe recycle pour d’autres usages ultérieurement.
10 – Sensibiliser les artistes
Enfin, le festival joue aussi un rôle de prévention, en cherchant à sensibiliser les artistes : ces derniers ont en effet beaucoup d’influence. Le We Love Green tend à faire en sorte que la « neutralisation » devienne un réflexe pour les artistes avec une green policy qui est communiquée à tous les artistes accueillis sur le festival.
Une initiative encore marginale à l’échelle mondiale, mais qui pourrait faire des émules si les publics de festivals deviennent davantage « consom’acteurs ».
Fun fact : lorsque le We Love Green festival a été créé en 2008, ce sujet était relativement nouveau. C’est pourquoi le festival a dû développer, avec un cabinet indépendant, sa propre calculette pour mesurer son bilan carbone.
Conscients d’un contexte environnemental qu’il faudra de plus en plus prendre en compte dans les projets culturels, nos enseignements prennent en compte la question climatique. Nos étudiantes en Mastère Management Culturel et en Bachelor Médiation et Communication culturelle ont ainsi l’occasion de suivre, au cours de leur cursus à l’EAC, un enseignement de Responsabilité sociétale des entreprises (R.S.E) ainsi qu’un cours de Communication responsable.